Le dimanche 11 novembre 2018, la Présidence de la républicaine gabonaise a officiellement communiqué sur l’état de santé du Chef de l’Etat du Gabon Ali Bongo, hospitalisé à Riyad, en Arabie saoudite, depuis le 24 octobre après un malaise. Ike Ngouoni le porte-parole de la Présidence du Gabon a évoqué le dernier bulletin de santé médical du Président pour évoquer un saignement justifiant une prise en charge médico-chirurgicale en secteur hautement spécialisé. Dès lors on s’interroge. Ainsi que doit-on apprendre du bulletin médical du président de la République ? (1) Cela relève-t-il de sa vie privée ou doit-il faire preuve de transparence ? (2).
1. Le Bulletin de santé du Président de la République
Le Président de la République n’est pas un personnage ordinaire. Il est le Président et le représentant de toute la Nation. Tout ce qui l’affecte, affecte la Nation en ce qu’il détermine et conduit la politique de la Nation. Comment pourrait-il le faire s’il n’est pas en bonne santé. Les constitutions ont prévu les cas d’empêchement d’exercice de la fonction de Président de la République liés à la santé défectueuse du Président. Si la santé relève de la vie privée, il n’en demeure pas moins que la vie privée du Président de La république est assez contigüe de son statut d’Homme Public. C’est comme l’artiste. On s’intéresse à sa santé parce qu’on estime qu’il appartient à soi. Il est donc justifié que l’opinion soit informée dans des proportions raisonnables, de la santé du président, qui doit être en capacité de remplir sa charge. Rassurer le peuple que celui qu’il a élu est toujours en possession de ses facultés pour remplir sa fonction, est un droit à l’information du citoyen. On devra éviter de tomber dans les faits divers comme une coupure au doigt à lame ou une égratignure au dos. La République est une affaire sérieuse. C’est pourquoi le bulletin de santé ne serait évoqué uniquement que dans le cas où un problème de santé porterait gravement atteinte à l’exercice des fonctions politiques légalement investies. La maladie fait partie de la vie. Un Président peut être malade ; il lui appartient d’informer le peuple en fonction des us et coutumes de son pays.
2. Une preuve de transparence mais…
Pour prévenir des troubles ou sauver la quiétude de l’Etat, la maladie du Président de la République est un secret d’Etat. C’est toujours considéré comme un sujet tabou. On peut se souvenir à dessin des derniers mois à l’Élysée de Georges Pompidou en 1974. Ce fut une période d’angoisse minée par une grave maladie du sang que la Majorité politique et les médecins s’efforcèrent de couvrir en parlant de simples « grippes ». Avec François Mitterrand, les choses ont vite tourné au secret d’Etat quand il a appris son cancer de la prostate. Il intima l’ordre à son médecin, le docteur Claude Gubler, de ne jamais en parler dans ses bulletins médicaux. « C’est un secret d’État. Et vous êtes lié par ce secret ». Son successeur, Jacques Chirac, supprima les communiqués médicaux réguliers. En 2005, quand il fut hospitalisé pendant une semaine après un accident vasculaire, il recommanda une communication minimaliste.
La question importante est de savoir qui peut décider que le premier personnage de l’État n’est plus en état d’assumer ses fonctions ? Est-ce que ses médecins personnels peuvent-ils se délier du secret médical dont chaque patient peut se prévaloir ?
C’est le constitutionnaliste Guy Carcassonne qui a trouvé une approche non retenue chez lui en France : « Tenus au secret absolu, ces experts médicaux rendraient ensuite leurs conclusions au Conseil constitutionnel qui, seul, aurait la possibilité de prononcer un empêchement du président pour une raison médicale ».
Les experts entretenus pourront-ils demander à leur patient de quitter la barre alors qu’ils vivent confortablement dans l’orbite du pouvoir ?
En somme, la santé du Président de la République intéresse le peuple. En cas de pathologie grave, il est important d’informer après avoir préparé les conditions sociopolitiques d’une telle annonce. Dans les pays de grande solidité institutionnelle, cette annonce met en branle le bloc de constitutionnalité sans que l’on craigne le pire.
Par H-Tauyé
Juri-Journaliste