L’ancien Doyen de la Faculté de droit et de science politique (Fadesp) de l’Université d’Abomey-Calavi (Uac) a fortement critiqué les nominations prononcées par le gouvernement dans les universités publiques. Selon le Professeur Frédéric Joël Aïvo, la méthode utilisée par la Rupture ne sert pas la cause de la communauté universitaire.
Alors qu’il s’apprêtait à passer le témoin à son successeur nommé par le gouvernement, le Professeur Frédéric Joël Aivo s’est adressé à la communauté universitaire. Dans un message que beaucoup qualifient de mémorable, le Doyen honoraire de la Fadesp/Uac a simplement balayé hier, lundi 04 février 2019, du revers de la main le mobile avancé par le pouvoir Talon pour procéder aux nominations des nouveaux responsables des Unités de recherches et de formation (Ufr) des universités publiques du Bénin. Si pour le gouvernement cette mesure constitue une phase transitoire en attendant la mise en place du Conseil national de l’éducation (Cne) qui définira la nouvelle gouvernance de l’éducation en général et des universités publiques en particulier, le Professeur Aïvo ne perçoit pas les choses sous cet angle. «Cher(e)s collègues, si dire à nos compatriotes ce qui est conforme aux grands principes de l’Etat, ce qui relève de la justice et ce qui ne peut être faussement vendu comme du droit, si faire l’apologie de la démocratie doit valoir d’être blâmé par le pouvoir politique, alors je suis très fier de ne pas avoir été maintenu contre votre volonté. Et même si je l’avais été, je me suis préparé à n’exercer aucun jour supplémentaire de mandat qui relèverait d’un pouvoir de nomination et non de l’élection. Le 12 février 2019 est la limite du mandat que vous m’avez confié. Il aurait été scrupuleusement respecté, quoi qu’il arrive. », a-t-il martelé pour dénoncer un règlement de compte politique. Ce qui conforte l’Agrégé de droit dans sa position est que l’élection des responsables remise en cause sous la Rupture est une pratique vieille de près de quatre décennies. « Maintenant, un nouveau jour se lève dans notre Université. Il se lève sur les ruines de plusieurs décennies d’acquis démocratiques. L’Université élit ses Doyens depuis les années 1980, donc sous le Prpb (Parti de la révolution populaire du Bénin, Ndlr). Si l’Université s’y accommode, le pays perdra confiance en la fine fleur de son élite et les principes cardinaux qui la gouvernent (l’autonomie des Universités et l’élection des Recteurs, Doyens et Directeurs) seront remis en cause », a regretté Frédéric Joël Aivo. Et d’insister: « A l’Université, être l’élu de ses pairs, sortir des entrailles de sa communauté est un privilège qu’aucune compromission avec le pouvoir politique, aucune cooptation partisane ne peut égaler. Quand on n’est pas capable de gagner loyalement une élection, on n’utilise pas ses réseaux et le pouvoir politique pour supprimer l’élection». Comme pour réprouver la procédure, les choix imposés par la Rupture. Pour lui, il faut toujours croire en la démocratie et la proclamer partout. « Malgré ces vents qui soufflent, malgré la répulsion des opinions divergentes, ma foi en la démocratie ne se fissure pas et j’ai bon espoir que notre Faculté restera le bastion du droit et de la justice.», a-t-il fait savoir. Il conseillera enfin à son successeur : « La FADESP doit rester le temple où on enseigne le droit, où on le défend et où le pays doit trouver des réponses légitimes, fermes et sans falsification aucune à ses angoisses».
M.M