Ratification de la Convention pour la protection des obtentions végétales (Upov): Ce que craignent les organisations paysannes !
Après avoir réussi le 30 avril 2018 à faire retirer de la plénière à l’Assemblée nationale, le rapport sur la ratification de la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (Upov) au regard des menaces pour l’agriculture béninoise, les organisations paysannes ont à nouveau donné l’alerte ce week-end. Inscrit à l’ordre du jour ce lundi, 11 février 2019 au parlement, l’examen de la demande de ratification de ladite Convention n’est toujours pas approuvée par ces organisations de la société civile…Que craignent-elles en réalité ?
En effet, il y a environ un an soit le lundi, 30 avril 2018, plusieurs organisations de la Société civile actives dans le secteur agricole dont Synergies paysannes et Jinukun, réunies au sein de la Convergence des luttes pour la terre, l’eau et les semences, ont manifesté contre une adhésion précipitée du Bénin à la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (Upov) adoptée à Genève le 19 mars 1991. Si leurs inquiétudes avaient reçu un écho favorable auprès des parlementaires notamment la Commission du Plan, de l’Equipement et de la Production de l’Assemblée nationale qui a décidé du retrait du rapport d’examen, ces inquiétudes demeurent les mêmes à ce jour, lundi, 11 février 2019 où le dossier de ratification de la Convention a été inscrit à l’ordre du jour de la plénière. Ces organisations s’opposent et dénoncent, à travers ladite Convention, le brevetage des semences locales, la perte de certaines semences locales et l’invasion des organismes génétiquement modifiés (Ogm). Dans un post sur sa page facebook, le député de l’opposition, Guy Mitokpè a également déploré le fait. Pour les acteurs du secteur agricole béninois, il n’est point question pour les députés d’autoriser la ratification de cet instrument international qui ne fera que nuire à l’agriculture béninoise. Conscients du fait que les chances soient minces cette fois-ci pour faire échouer le vote, ils appellent au sens de responsabilité des élus du peuple. Dans une note d’alerte, Synergie Paysanne informe qu’«il s’agit d’une loi favorable à la privatisation et au brevetage de nos semences paysannes par des multinationales et les individus les plus nantis». Cette loi, prévient la structure, va conduire à la perte des droits et libertés de choix des paysans et paysannes du Bénin sur leurs propres semences, les rendant ainsi dépendants des détenteurs des brevets sur leurs semences. L’usage des Organismes génétiquement modifiés (Ogm) se trouverait donc bien confortée avec la ratification de la Convention. Et ceci, malgré les risques d’intoxication alimentaire découlant et autres conséquences y afférentes. Le sort de l’agriculture béninoise une fois encore se jouera au parlement…
Quid des conditions préalables à la ratification…
Les organisations paysannes avaient préconisé le 30 avril 2018, des conditions préalables indispensables avant toute adhésion aux actes de la Convention internationale de protections des obtentions végétales (Upov). Elles avaient exigé la mise en place d’un comité semence ; la prise d’un certain nombre de dispositions de décrets et arrêtés pour compléter les cadres réglementaire et légal dans le secteur au Bénin et l’élaboration d’un tableau qui renseigne sur les avantages, les inconvénients, les menaces et les opportunités de cette convention pour le Bénin. Et cela, conformément aux recommandations de la journée d’information et de sensibilisation organisée, le 13 mars 2018 à Cotonou, par le ministère en charge de l’Agriculture au profit des acteurs notamment la Société civile et des députés. Sans ces mesures de précaution, inutile de se hasarder à opter pour la ratification, selon les acteurs du secteur agricole. Ce dossier sensible concernant le patrimoine semencier du Bénin mérite bien d’être étudié minutieusement en tenant compte de tous les aspects et surtout de façon consensuelle avec les principaux acteurs du secteur agricole. Ceci, avant toute soumission aux délibérations de la Représentation nationale. Notons que la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales a été adoptée à Paris en 1961, et celle-ci a été révisée en 1972, 1978 et 1991. L’objectif de la Convention est la protection des obtentions végétales par un droit de propriété intellectuelle. » Elle vise à établir et promouvoir un système efficace de protection des variétés végétales afin d’encourager l’obtention de variétés végétales améliorées. La ratification devrait permettre au Bénin de participer désormais aux travaux des organes de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (Ompi) et de tirer avantage de cet instrument juridique notamment en matière d’accès à des variétés performantes sélectionnées à l’étranger.
Aziz BADAROU