Le premier juin dernier le journal Matin Libre à choisi sa manière de célébrer la journée de l’arbre en approchant quelques baobab de la musique traditionnelle béninoise. Parmi eux Hoonon Houlovo, une légende du Zinli royal d’Abomey peu connu du monde des fans et mélomanes de l’art musical. Découvrez-le.
En 1939 ce rossignole du Zinli dodo d’Abomey poussait ses premiers cris dans le firmament de la musique traditionnelle béninoise. Hoonon Houlovo à l’état civil, le chanteur attitré a préféré s’écarter de la fantaisie en maintenant son propre nom comme pseudonyme. « Je me souviens très bien que ce jour où le souffle de la muse m’a inspiré c’est le jour du marché Houdjro et il y avait même eu un tremblement de terre assez moins grave », remontait-il avec fascination dans un fongbé timbré d’un accent original pour indiquer de manière claire ce souvenir lointain que tout le monde aurait aimé garder. A côté de son métier de cultivateur qu’il exerce pour nourrir des deux femmes et ses enfants, le fils de Zoukou (commune de Zogbodomey-‘’Abomey’’) s’est occupé avec maestria du Zinli royal tel que joué dès sa création dans le royaume d’Abomey. Avec son sens humoristique très poussé Houlovo souligne qu’à l’époque lorsqu’il a entrepris cette activité de chanteur, il a eu à essuyer sur le parcours des difficultés comme dans toute activité humaine d’ailleurs. « Je puis vous dire qu’il n’y a rien que l’on entreprend sous ce soleil sans difficulté », dit-il d’une voix complètement affaiblie par la grande sagesse qu’il incarne de par la centaine qu’il avoisine. « J’ai été victime des rivalités. Et par ailleurs, je n’ai pas eu assez de soutien d’hommes volontaires capables de me pousser en ce qui concerne la production », ajoute le nonagénaire (âgé de plus de 90ans) avant de souligner dans un humour plaisant coloré d’un sourire ridé «En me voyant vous vous faites peut être l’idée de ce que je suis assez vieux pour entretenir sexuellement mes deux femmes. Je continue de tirer les quatre coups chaque nuit avec elles. Et si vous voulez le savoir ‘’le récipient qui va au contact d’une précipitation pluvieuse ne manque pas de se faire entendre’’ (une incantation pour signaler que sur le plan sexuel l’homme continue de résonner) ». De taille moyennement élancée, le vieil homme aux cheveux grisonnants traine dans sa démarche le poids de l’âge. A en croire ses explications, l’ensemble de ses morceaux font revivre le quotidien des hommes et retrace des leçons philosophiques enjolivées d’une chaîne de métaphore. Pour le fait savoir le rossignole a fredonné sur place un air qui mentionne satiriquement ceci « Lorsque la nature leur offre la grâce de trouver un bout de pain quotidien à manger, en te voyant venir chez eux en ce moment précis, ils se chuchotent à l’oreille ‘’ton type viens encore’’. Je prie fortement Dieu de m’épargner ce destin. C’est moi qui vais vivre parmi eux et constituer leur objet de risée ? Mon Dieu ne va jamais accepter cela». Une manière pour lui de relever ce fait social qui consiste à vivre difficilement parmi les hommes en général et en famille en particulier, compte tenu de leur cynisme et attitude dégradante, avilissante voire humiliante. Et déjà on remarque que le vieil homme est empreint de rigueur et très laborieux. « Si vous allez aujourd’hui dans mes palmerais ou dans mes champs vous allez vous rendre compte que dans ma jeunesse j’ai travaillé dur »
Le sage prodigue des conseils…
Pour perpétuer dans le métier d’artiste chanteur il faut éviter totalement d’adopter des attitudes peu orthodoxes à l’égard de ses membres de groupes. « Moi qui suis ici, pendant tout ce temps que j’ai exercé ce métier jusqu’à cet âge où vous me voyez je ne me suis jamais acharné sur les jeunes dames de mon groupe dont je suis le chef. Ce n’est pas parce que je suis le chef que les enfants d’autrui que j’ai sollicités pour venir m’aider, je vais me mettre à entretenir des relations malsaines avec elles. C’est un phénomène qui constitue un véritable frein pour la carrière musicale de quelqu’un qui souhaite vraiment aller loin », souligne l’ancienne gloire avant d’ajouter que la persévérance constitue une vraie clé pour mener à bien sa carrière si on y tient.
Teddy GANDIGBE