Modification de la Constitution béninoise : Le film de la nuit du 31 octobre à l’Assemblée nationale

 « 83 pour, 0 contre, 0 abstention : la loi N° 2019-40 portant révision de la loi N° 90-032 du 11 décembre 1990 a été adoptée à l’unanimité des députés présents et représentés ». Tel est le verdict ayant sanctionné la fin de la procédure de la révision de la Constitution au Palais des Gouverneurs dans la nuit du jeudi 31 octobre 2019 au vendredi 1er novembre 2019. Ainsi, l »histoire retient désormais que les 83 députés de la 8ème législature ont, pour la toute première fois, modifié la Loi fondamentale béninoise vieille de presque 30 ans. Un événement vécu de manière diverse aussi bien au sein de l’hémicycle, qu’en dehors.

Retour sur  le film de la plénière  consacrée à l’examen de cette propositions de lois modificative de la loi portant Constitution du Bénin

 

En effet, issue des recommandations du dialogue politique des 10, 11 et 12 octobre 2019, la proposition de loi portant révision de la Constitution a été introduite avec une demande d’étude en procédure d’urgence le mardi 29 octobre 2019 par le député Augustin Ahouanvoebla et 09 de ses collègues.

Ce jeudi 31 octobre 2019, la plénière a débuté par l’examen de la proposition de loi portant amnistie qui a été adoptée à l’unanimité des députés présents et représentés. Le président Louis Vlavonou a annoncé  la proposition de loi portant modification de la Constitution. La commission des lois a présenté son rapport à la plénière. Il a été signalé que cette procédure de modification de la loi portant Constitution béninoise doit se faire en deux étapes: il faut dans un premier temps contrôler la recevabilité ou non de la proposition de loi, c’est-à-dire qu’il faut  voter  pour la prise en considération ou non de la proposition de modification. Ce qui a été fait et soldé par une approbation à l’unanimité des députés présents et représentés.

Le premier vote effectué est donc celui de la prise en considération. Selon l’article 154 de la constitution, « l’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au président de la République, après décision prise en Conseil des ministres, et aux membres de l’Assemblée nationale. Pour être pris en considération, le projet, ou la proposition de révision, doit être voté à la majorité des trois quarts des membres composant l’Assemblée nationale».  « La révision n’est acquise qu’après avoir été approuvée par référendum, sauf si le projet ou la proposition en cause a été approuvée à la majorité des quatre cinquièmes des membres composant l’Assemblée nationale»,

La commission des lois doit se réunir après cette étape pour une étude en profondeur c’est-à-dire article par article. La séance plénière a été suspendue à cet effet à 16 h pour être reprise après une heure.

Les modifications

 

Malheureusement, elle n’a véritablement été reprise qu’à 19 h 30′. Le président de la commission des lois Orden Alladatin a présenté le rapport. On note  selon ce rapport l’instauration de la vice-présidence de la République, une disposition de discrimination positive en faveur des femmes pour augmenter leur représentativité dans les instances politiques dont le Parlement. On note aussi  l’institutionnalisation des élections générales,  la création de la Cour des comptes, la limitation des mandats: trois pour les députés et deux pour le président de la République durant toute sa vie. Ceci a donné le top au débat général.

 Dans son intervention, le député Barthélemy Kassa,  informe que l’une des modifications proposées concerne la limitation à 03 des mandats des députés. « Aucun député ne peut plus faire plus de 03 mandats », a renchéri l’honorable Rachidi Gbadamassi, président de la Commission Défense et relations extérieures.

Même le serment prononcé avant l’entrée en fonction du président de la République a été touché. Certains députés ont demandé le retrait de l’expression « les Mânes des Ancêtres ». En effet, selon l’article 53 de la Constitution de 1990,  avant son entrée en fonction, le président de la République prête le serment suivant: « Devant Dieu, les Mânes des Ancêtres, la Nation et devant le Peuple béninois, seul détenteur de la souveraineté (…).» Certains députés ont demandé le retrait de la portion « les Mânes des Ancêtres ». Ils justifient leur amendement par le principe de laïcité de l’Etat béninois garanti par la Constitution elle-même.

Un incendie manqué à l’hémicycle

 

Le débat était houleux au cours de la séance plénière avec la question de l’instauration  de la vice-présidence de la République quand soudain dans un bruit affreux avec échappement des larmes de feu un climatiseur  cède provoquant la débandade, le-sauve-qui- peut au sein de l’hémicycle. Députés, fonctionnaires parlementaires tous ont dû détaler, vidant l’hémicycle en fraction de seconde. La sécurité a vite réagi pour éteindre le feu avant qu’il n’atteigne les rideaux de l’hémicycle. À l’aide des extincteurs, la garde républicaine détachée au parlement a circoncis ce feu avant l’arrivée des sapeurs-pompiers mais tout l’hémicycle était noir de fumée. C’était aux environs de 22 h. Les travaux en plénière ont repris quand l’ordre fût rétablie. « Nous étions en train d’écrire la plus belle page de l’histoire politique récente de notre pays. Et comme on n’avait pas de feux d’artifice, la nature nous a gratifiés d’un petit feu d’artifice de quelques secondes. Cela a détendu l’atmosphère. C’est très bien je trouve », dixit le Président de l’Assemblée nationale Louis G. Vlavonou à propos du court-circuit qui a interrompu momentanément les travaux d’examen de la proposition de loi portant modification de la Constitution.

Pour ce qui est du Mécanisme de transition avant les élections générales en 2026

La proposition de loi prévoit des dispositions transitoires avant la mise en œuvre des réformes majeures prévues, notamment les élections générales (présidentielle, législatives et communales).  Les auteurs du texte proposent les premières élections générales pour 2026. Le mandat des élus locaux, communaux et municipaux qui seront désigné aux élections communales de 2020 va courir jusqu’à 2026. Ils seront donc élus pour 6 ans. Les députés de la 8ème législature vont rester en place jusqu’à la fin de leur mandat de 4 ans en 2023. Les députés à élire en 2023 auront un mandat transitoire de 03 ans qui prendra fin avec les premières élections générales de 2026. Le mandat de 5 ans du président de la République reste inchangé. L’élection présidentielle aura donc lieu en 2021, puis en 2026. Mais les autres modifications concernant l’élection du président de la République entreront en vigueur à l’occasion de l’élection présidentielle de 2021. Il s’agit notamment du parrainage des candidatures et l’instauration du duo présidentiel (président et vice-président). De même, avant 2021, en cas de vacance du pouvoir, le reste du mandat sera assuré par le président de l’Assemblée nationale. Les députés élisent, dans ce cas, un nouveau chef du Parlement.

Loi modifiée adoptée à l’unanimité

 

La proposition de loi portant modification de la constitution comporte deux articles. Après les débats, place au vote. Le vote a lieu en deux étapes.  La première étape du vote a consisté a adopté article par article la proposition de loi. Par un vote à main levée, les deux articles ont été adoptés à l’unanimité des députés présents et représentés. Le deuxième article de cette  proposition de loi modificative a précisé que ces modifications n’établissent aucune nouvelle Constitution donc pas de nouvelle République. La deuxième étape concerne l’adoption du rapport général de la commission des lois, donc l’ensemble de la proposition de loi. Selon le règlement intérieur du Parlement, pour toute adoption qui requiert une majorité qualifiée, le vote se fait à la tribune. Les députés avaient deux options : un vote public à la tribune ou un vote secret à la tribune. Comme pour la prise en considération, ils ont décidé de recourir au vote public à la tribune. Résultat : 83 pour, 00 contre, 00 abstention. La proposition de loi portant modification la loi portant  Constitution du Bénin a été adoptée à l’unanimité des députés présents et représentés.

Défi relevé pour certains, douleur pour d’autres

 

Certains sont restés sur leur soif au sein des populations. Même si l’horloge principale de l’hémicycle a été bloquée sur 23h50 jusqu’à la fin de la séance plénière, l’histoire retient que c’est à l’aube du jour de la commémoration de la fête de tous les Saints que les députés de cette 8ème législature ont modifié pour la première fois la Constitution béninoise du 11 décembre 1990  après 29 ans d’existence par un parlement entièrement monocolore, acquis à la cause du régime du président Talon. Afin de rendre solennel cet acte, les députés ont  chanté l’hymne national avant la suspension de la plénière. Ont-ils été audacieux, seul le temps le dira.

Une population totalement désintéressée

 

La question de la modification de la Constitution béninoise avait toujours fait couler d’encre et de salive au sein de la population béninoise. Si pour les précédentes tentatives soldées par des échecs, il y avait eu beaucoup  d’engouement, d’enthousiasme au sein de la population, cette dernière tentative n’a soufflé ni chaud, ni froid chez les béninois. Les alentours de l’Assemblée nationale sont restés déserts pendant que les députés modifiaient la Constitution alors que par le passé, les forces de l’ordre vivent une grande pression d’habitude du fait du nombre important de la population qui veut accéder à l’esplanade de l’Assemblée nationale pour manifester leur mécontentement. Sur les réseaux sociaux, l’ambiance était moche. Le débat ne se menait pas ou presque pas. La peur de mal parler et se retrouver demain en prison a gagné certains tandis que, pour d’autres, les dés sont pipés. Ce n’est qu’une formalité.

Les Innovations

 

Les députés de la huitième législature ont adopté au petit matin de ce vendredi 1er Novembre 2019, la loi N°2019-40 portant révision de la Constitution du 11 décembre 1990, par 83 voix pour, 0 contre et 0 abstention.

De cette nouvelle disposition, on peut retenir essentiellement ce qui suit:

-le Président de la République ne peut faire plus de deux (02) mandats dans sa vie,

-les députés ne pourront plus excéder trois (03) mandats,

-la suppression de la peine de mort,

-la constitutionnalisation de la Cour des comptes

-l’organisation des élections générales pour 2026 qui implique que le mandat des élus locaux, communaux et municipaux qui seront désignés aux élections communales de 2020 va courir jusqu’à 2026, les députés de la 8è législature vont rester en place jusqu’à la fin de leur mandat actuel de quatre (04) ans, et ceux qui seront élus en 2023 auront un mandat transitoire de trois (03) ans qui prendra fin avec les premières élections générales programmées pour 2026 ;

-le parrainage des candidatures pour ce qui concerne les élections présidentielles à compter de 2021 et l’instauration du ticket présidentiel (Président et vice-président).

Les dispositions touchées

 

La Constitution du 11 décembre 1990 est désormais  modifiée. Ainsi certaines de ses dispositions ont été modifiées. Il s’agit en l’occurrence des articles 5, 15, 26, 41, 42, 43,44, 45, 48, 49, 50, 52, 53, 54, 54-1, 62, 6261, 62-2, 62-3, 62-4, 80, 81, 82, 92, 99, 112, 117, 119, 131, 132, 134-1, 134-2, 134-3, 134-4, 134-5, 134-6, 134-7, 143, 145, 151-1, 153-1, 153-2, 153-3, 157-1, 157-2 et 157-3.

Kola PAQUI

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