Pandémie du Covid-19 et migrants au Bénin « : Aucun clin d’œil envers les travailleurs migrants », selon Anselme Amoussou

La crise sanitaire mondiale du Covid-19 n’a pas épargné les travailleurs migrants. Et à l’occasion de la Journée internationale des migrants célébrée le 18 décembre dernier, plusieurs rapports ont révélé l’impact de la pandémie sur ceux-ci. Au détour d’un entretien accordé au journal du service public, Anselme Amoussou, secrétaire général de la Csa-Bénin et  coordonnateur de la plateforme multi-acteurs de la migration au Bénin déplore le fait que les travailleurs migrants ne soient pas bénéficiaires des mesures économiques et sociales prises par le gouvernement pour accompagner les couches défavorisées…

 

« Au Bénin, le gouvernement a annoncé plusieurs mesures économiques et sociales en faveur des couches les plus défavorisées. Curieusement, aucun clin d’œil n’est fait en direction des travailleurs migrants. Ils sont non seulement abandonnés dans cette situation de crise dans leurs pays d’accueil mais également oubliés dans leurs pays d’origine où la plupart des mesures ne tiennent pas compte des diasporas. En Afrique, les travailleurs migrants opèrent dans l’informel. Ce qui suppose qu’ils exercent dans la précarité, subissent le non-respect de leurs droits et subissent des difficultés sociales. Les migrants se retrouvent dans des situations difficiles, sans interlocuteurs pour défendre leur cas » déplore Anselme Amoussou. Pour le jeune leader syndical, la plateforme multi-acteurs de la migration au Bénin a commandité une enquête qui a révélé la déscolarisation des élèves dans certaines familles. « Des familles sont obligées de séjourner pendant longtemps dans d’autres pays à cause de la fermeture des frontières. Les travailleurs migrants vivent des situations de détresse. Leur vulnérabilité mérite une attention et l’accompagnement de toutes les personnes de bonne volonté » poursuit-il. Evoquant la Journée internationale des migrants, il a confié qu’il s’agit d’une occasion pour faire la lumière sur la situation des travailleurs migrants dans le monde. Car, affirme-t-il, on ne choisit pas toujours d’être migrant. Des situations y obligent certains, à la quête du mieux-vivre et mieux-être. C’est un choix souvent risqué que beaucoup regrettent, selon Anselme Amoussou. « La xénophobie est très forte par endroits. Les difficultés sociales peuvent amener les peuples à adopter des positions très difficiles vis-à-vis des travailleurs étrangers. Cette journée est une occasion pour les pays de réfléchir sur la situation des migrants et d’apprécier la partition des organisations sociales dans la défense des droits des travailleurs migrants. La plupart du temps, leurs droits ne sont pas respectés » clarifie-t-il avant de se réjouir du fait qu’au Bénin, les populations aient la culture de l’accueil et de la tolérance. Toute chose qui contribue à réduire les difficultés des migrants dans le pays. Et de poursuivre « la célébration de cette édition est importante en raison de la pandémie de Covid-19 pour penser à la diaspora et aux migrants résidant au Bénin afin de leur montrer la voie de l’intégration apaisée dans l’action collective ».

La migration: un levier de développement

Nul doute, la migration a toujours été un levier de développement et plusieurs pays l’ont compris depuis des années, selon Anselme Amoussou. « C’est pour cette raison qu’en Afrique de l’Ouest, des accords d’intégration sont signés et les pays essayent de les mettre en application. Imaginez toutes les pertes économiques engendrées par la fermeture de la frontière bénino-nigériane ! La migration n’est pas seulement humaine, elle est aussi la migration de la compétence, de la performance et celle des technologies. Un certain nombre d’acquis sont en train d’être remis en cause avec la Covid-19. En situation de crise, les pays ont tendance à se refermer pour mieux réagir. Dans ces conditions, ce sont les frontières qui se referment, c’est l’hospitalité qui prend un coup et les relations humaines qui se dégradent. L’analyse de l’Ocde impose des efforts supplémentaires aux organisations sociales qui essayent de défendre les droits des migrants » a expliqué le coordonnateur de la plateforme multi-acteurs de la migration au Bénin. Il estime, par ailleurs, qu’il faut intensifier des actions pour offrir un environnement favorable aux migrants. « Nous devons agir en tant que lobbyiste et plaideur auprès des gouvernants afin de les amener à mieux comprendre les difficultés des migrants. Tout humain doit mieux se sentir chez lui ou ailleurs, tant qu’il respecte la législation nationale » martèle Anselme Amoussou. A cet effet, « la plateforme se positionne comme un intermédiaire entre les dirigeants et les migrants. Elle s’est dotée d’un plan d’action sur trois ans grâce auquel elle organise le plaidoyer pour obtenir des pouvoirs publics la ratification d’un certain nombre d’instruments juridiques internationaux spécifiques à une meilleure protection des droits des migrants. Nous faisons ce lobbying en direction des membres du gouvernement afin de créer une proximité avec les services techniques chargés de l’application des normes et de la protection des droits. La plateforme veille à la sensibilisation des migrants à leurs droits et devoirs. Elle a créé un centre d’écoute et d’assistance aux migrants situé à la Bourse du travail et vient d’éditer un guide d’orientation et d’installation des migrants au Bénin ». C’est donc évident que les travailleurs migrants demeurent exposés à des risques inquiétants et il urge que les gouvernants s’en préoccupent davantage.

Aziz BADAROU

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