Sylvain Adékpédjou Akindès sur les 60 ans d’indépendance du Bénin: « (…) notre État a gardé la même philosophie (…) que l’État colonial »

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60 ans après son accession à l’indépendance, où en est le Bénin sur le plan politique ? L’ex Dahomey et République populaire du Bénin a-t-il aussi fait des bonds en matière de développement ? Dans la fièvre de ce soixantième anniversaire que le pays commémore chaque 1er août, votre journal Matin Libre a réalisé une série d’entretiens avec divers acteurs. Qu’ils soient politiques, syndicalistes, du milieu culturel ou sportif… L’ancien ministre Sylvain Adékpédjou Akindès donne ici sa lecture du Bénin d’aujourd’hui tout en livrant sa vision du Bénin dont il rêve.  Lire le verbatim.

 

Matin Libre : Acteur politique, très bien connu des Béninois, vous continuez d’ailleurs d’animer la vie sociopolitique sinon de vous prononcer sur des sujets concernant votre pays, le Bénin. Mais au-delà de votre nom, est-ce que vous pouvez nous résumer votre Cv en 60 ou 90 secondes ?

Ministre Akindès : Né à Porto-Novo, école primaire à Porto-Novo, secondaire à Porto-Novo, école supérieure à Paris, je suis revenu, Professeur,  je suis reparti en stage, je suis revenu. À mon retour, professeur de mathématiques. J’ai été propulsé Directeur général du ministère des Enseignements technique et supérieur puis ensuite Directeur général de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique puis Directeur du Cpu (Collège polytechnique et universitaire, aujourd’hui Epac), et la retraite. Un an après la retraite, je suis allé au gouvernement de Kérékou, je suis resté, je crois, cinq ans à peu près. J’ai fait d’abord le ministère de l’Environnement, de l’habitat et de l’urbanisme, puis le ministère chargé des relations avec la Société civile et les Béninois de l’extérieur. En même temps, j’ai été responsable de parti politique : Alliance pour la démocratie et le progrès, puis député à l’Assemblée nationale.

 

Je ne vais pas vous demander votre âge, mais rien qu’à vous voir, on sait que vous êtes né avant 1960.

Oh là là, je suis né vers 1941, si vous voulez savoir (sourire)

Ça veut dire que vous êtes effectivement né avant 1960, année de la proclamation de l’indépendance du Bénin. Alors, monsieur le ministre, où étiez-vous quand le Bénin accédait à son indépendance ?

C’est l’année où j’avais le Baccalauréat, à Porto-Novo, bien sûr. Je vous ai dit que j’ai fait le secondaire à Porto-Novo. Donc, j’ai assisté à la cérémonie à minuit, au Palais des Gouverneurs. Quand Maga a prêté serment, on était très joyeux parce que nous étions des étudiants, plus ou moins politisés pour l’accession du Bénin à l’indépendance. Donc nous étions heureux tout en étant inquiets. Bon, à cet âge-là, on ne voit pas la différence énorme entre les choses, mais nous savions que nos leaders n’avaient jamais lutté pour l’indépendance et qu’on le leur a imposée pratiquement. Donc, c’est dans cette idée là que le 1er août on a proclamé l’indépendance, et en septembre, moi je partais pour mes études supérieures.

 

Et comment vous l’avez vécue, cette indépendance ?

Je n’étais pas assez conscient des défis de développement et des changements profonds qu’il fallait opérer. Donc, j’étais adolescent. L’indépendance,  » Ablodegbadjaa  », on disait à cette époque-là parce qu’on a commencé par le Ghana, ensuite le Togo… Mais c’est surtout Sékou Touré qui nous avait marqués depuis 58. Parce que depuis 58 déjà, nous, nous demandions l’indépendance. Mais tous nos responsables étaient contre l’indépendance. Donc on a vécu ça comme une victoire, si vous voulez. Mais on a vécu ça un peu comme un nouvel engagement que nous devions prendre envers le pays. Donc, on entrait dans l’enseignement supérieur en disant qu’il faut absolument que nous revenions ici former les gens, travailler pour le pays pour faire avancer le Bénin et pour concrétiser ce que nous pensions que devrait être l’indépendance.

 

Mais est-ce que de cette proclamation aux nombreuses célébrations que nous avons connues, des choses ont changé ?

(Soupir). Si vous voulez qu’on fasse l’histoire des régimes ou qu’on fasse ce débat-là… Disons d’abord que j’ai passé six ans voire sept ans à l’extérieur. Donc les premières années, je n’ai pas suivi. Je l’ai suivi de loin, en tant que responsable d’étudiants, donc je connaissais un certain nombre de choses. Disons qu’après l’indépendance, le mouvement général, c’est mettons-nous tous ensemble pour construire le pays.

 

Est-ce que sur le plan ferveur, éclat, solennité, de cette proclamation aux nombreuses célébrations il y a eu changements ?

Voyez-vous, ce que je retiens de ces 1er août, c’est défilé, les ministres qui se mettent en bon habit, le président qui se met en redingote, on fait la fête, les travailleurs défilent, les femmes défilent, les scouts défilent. C’est tout !

 

Donc, pour vous, on n’est pas resté dans l’esprit de 1960?

Si. En 1960, on a fait pareil. Mais il n’y avait pas de contenu.

 

En 1960, il n’y avait pas de contenu ?

Non, je ne pense pas honnêtement qu’il y ait un contenu jusqu’à aujourd’hui en ce qui concerne l’indépendance, du fait qu’on a changé de statut, parce que ma vision à moi, c’est qu’une République c’est l’affaire des populations. C’est ce qu’on croit. La démocratie, c’est les populations qui s’expriment. Mais elles s’expriment en connaissant quoi? Sur la base de quels critères ? De quelle expérience ? De quelle notion de l’État ? J’ai l’impression jusqu’aujourd’hui que notre État a gardé la même philosophie, la même démarche que l’État colonial. Parce qu’à aucun moment on n’a formé les populations à un patriotisme réel pour montrer que c’est elles qui sont les détenteurs du pouvoir. Évidemment, les gens attendent, comme avant, qu’on fasse l’école, qu’on fasse la route, qu’on fasse le marché, etc., aller trouver des projets. Voilà ! On pense que les meilleurs gouvernements

, c’est ceux qui peuvent aller chercher de l’argent ailleurs pour le pays. Est-ce que ça là, c’est du patriotisme? Est-ce que c’est ça un pays? Est-ce que c’est ça la démocratie ? La démocratie, les gens doivent savoir que c’est eux-mêmes qui doivent construire leur pays. On peut demander des aides si on veut, parce que c’est la mode. Mais il faut insuffler aux populations, l’effort. Disons que juste après l’indépendance, ils ont essayé ce que j’appelle les champs collectifs où on allait labourer pour augmenter la production agricole, etc., mais sur des produits d’exportation. Il n’y a pas de plus-value là. Il n’y a pas de gain particulier pour l’État puisqu’on vend, on ne transforme pas ici, on utilise la main d’œuvre d’ici, elle produit seulement, on ramasse et on s’en va. Pour moi, la notion d’indépendance, ce n’est pas ça. Si les gens doivent sentir qu’il y a un État, il faut qu’il sente que c’est eux-mêmes l’État. Et que ce que l’État fait, c’est eux-mêmes qui contribuent pour le faire. Au niveau de la Révolution, ils ont essayé un peu….

 

Mais est-ce que pour vous, on met ces populations à l’écart ou ce sont elles-mêmes qui se mettent à l’écart ?

Les populations ne se mettent pas à l’écart, elles étaient déjà à l’écart (rire). Pendant la colonisation, elles étaient déjà à l’écart. Le Gouverneur donne, le Commandant donne, voilà ! Mais justement, le problème c’est que les premiers responsables, comme beaucoup d’autres après, étaient dans l’esprit d’être des Français avant l’indépendance : intégration, nationalité française,  »akowé » (intellectuel, bureaucrate Ndlr). Je vous dis, mon père même, il dit : « je marche comme on marche sur les champs Elysées de Paris ». Mon père, son modèle c’est comment on marche sur les Champs Elysées de Paris. Voyez-vous, cette vision de nos intellectuels, parce que c’est eux la politique, la classe politique, c’était eux. C’était surtout les fonctionnaires. Petit à petit, il y a eu des non fonctionnaires, des gens de l’armée, et après ça a poussé vers le secteur privé. Donc, je pense qu’on n’a pas su insuffler aux populations ce que c’est que l’État et en quoi notre État doit être réellement indépendant. Qu’est-ce que ça signifie un État réellement indépendant ? Voilà la question.

 

Mais pour vous qui faites partie de l’élite, vous en tant qu’ancien ministre, en tant qu’ancien député, disons en tant qu’acteur politique, est-ce que sur le plan politique par exemple, il y a des évolutions ?

Je ne sais pas ce que vous entendez par sur le plan politique et évolutions sur le plan politique…

 Est-ce qu’on a fait des progrès, est-ce qu’on a fait des bonds?

Mais, je dis, la politique c’est gérer l’État, gérer les populations.

Les critiques que je viens de faire montrent très bien qu’on ne les a pas bien gérés. Je ne vais pas me répéter. Il y a eu des gens, bon au départ c’était Nord, centre, sud un peu comme ça. Mais ça, c’est l’issue de ceux qui sont arrivés de l’extérieur, puisque toutes les études pour devenir cadre c’est à l’extérieur, ou c’est à Dakar, ou c’est à Bamako ou c’est en France, et après ça a été la Côte d’Ivoire. C’est ceux-là qui se sont réunis. Ils étaient seulement des gens qui parlaient français. Vous ne verrez pas quelqu’un qui ne parle pas français dans un bureau de quoi que ce soit. C’est ceux qui ont été instituteurs généralement, médecins, administrateurs civils, etc. Voilà ceux qui faisaient la politique. Plus en soutien, les traitants des produits agricoles. Ceux-là sont plus ou moins organisés. C’est d’ailleurs eux qui financent la campagne.  C’est eux qui finançaient les déplacements des hommes politiques. C’est eux qui les accueillaient, ils ne demandaient pas l’argent. En ce qui concerne la gestion politique du pays, je pense que la chose essentielle a été ratée. Quel type de Dahoméen, de Béninois a-t-on mis en place? Le Béninois d’aujourd’hui a-t-il une conscience différente du Béninois sous la colonisation ? A-t-il une vision différente du Béninois sous la colonisation ? Je dis, non! Nos repères, c’est toujours l’extérieur. Si un président vient, «  je vais faire de Cotonou, un petit Paris ». Mais pourquoi ? Quel est le paysan ? Quel est le tailleur, le ‘’Zémidjan’’ (taxi moto Nldr) d’ici qui connait Paris ? On fait miroiter le modèle occidental, on n’a pas dit Pékin hein (rire), on n’a pas dit New York (rire), on n’a pas dit Rio de Janeiro. Non, Paris! On ne parlera même pas de Bruxelles parce que nous, nous sommes Franco-français. Alors, voilà ce que je pense.

Mais monsieur le ministre, d’aucuns vous diront que de 1972 à 1989, nous avons connu le Marxisme-Léninisme avec le parti unique. Après 90, ça a été la démocratie avec le multipartisme intégral, et puis aujourd’hui on parle de Réformes du système partisan. Ce sont quand même des étapes que nous avons franchies?

Ascendantes ou descendantes?

A vous de nous le dire…

Non, moi je ne sais pas (rire). Bon, je vais vous dire ce que je pense réellement. La Constitution dont on parle là, elle préparait le pouvoir personnel. Clairement. Depuis 90, elle n’a pas changé la nature du régime. Elle a changé par le fait que les populations qui sont à la base ne sont plus associées. C’est ça la réalité. À la base avant, tu pouvais être chef de quartier sans écrire français. Tu pouvais être chef d’arrondissement. Tu es chef d’un groupe, et ce que tu écris, c’est dans la langue qu’ils ne parlent pas. Vous trouvez ça normal ? Vous commandez des gens, vous écrivez des notes de service, ils ne peuvent pas lire. Mais vous gouvernez qui? Vous représentez qui ? Quand je dis, nous sommes restés dans la même lignée, c’est ça. Vous allez au Sénégal, à la télévision ils se mettent à parler  » wolof   ». Est-ce que ça existe ici? Non, rien. Or, le Sénégal est plus français que nous dans l’histoire. Pourquoi c’est comme ça ? Moi-même je me rends compte que dans mon approche des questions, dans mes expressions, je ne m’adosse pas sur la culture béninoise. J’essaye. Mais c’est vraiment un effort, parce que j’ai l’impression que j’ai été formé, j’allais dire formaté comme ça. Je réagis comme aurait réagi un petit Français avec la différence que je suis dans un pays qui s’appelle le Bénin. Aujourd’hui, quel est le model d’un enfant d’un bon cadre ? Il faut qu’il parle français, il faut les bourses étrangères. Ce n’est pas ça ? Comment vous voyez le développement d’un pays où les gens qui ont les plus de moyens préfèrent que les gens reçoivent une formation qui n’est pas celle intégrée dans leur société et ne cherchent pas à améliorer la formation ici. Donc, je pense qu’il y a un problème. Le problème que j’ai identifié, c’est le problème des intellectuels, ‘’akowé’’ qui sont rivés à la culture française, qui ne connaissent pas leur pays. Moi, je connais un tout petit peu, mais je suis conscient que je ne connais pas, et mon effort doit être me coller pour me coller le plus possible aux réalités. Il ne s’agit pas de recopier tout ce qui me paraît illogique, (…) on peut voir ce qui peut nous permettre d’avancer.

Je dirai aussi à votre suite qu’il ne s’agit pas non plus de jeter tout…

Non, est-ce qu’on peut jeter tout?

Dites-nous alors ce qui a marché, ce qui vous a marqué positivement sur le plan politique, par exemple, durant les 60 ans. L’après indépendance.

Je suis très critique parce que pour moi, la politique c’est gérer la population et lui donner la conscience d’être un État.

Mais, avant, on parlait par exemple de chef canton, etc. Aujourd’hui c’est la décentralisation …

Quoi? On n’a pas nommé des chefs cantons là? Ce n’est pas des chefs cantons qu’on a nommés là ? (Rire). Écoutez, ne m’amenez pas à dire des choses… Qu’est-ce qui se passe maintenant ? Vous dites avant, comme s’il y a un changement. Je vous dis qu’il n’y a pas changement. Dans le fond, il n’y a pas changement. Tant qu’on ne fait notre administration selon les endroits, dans les langues que parlent les populations, je pense qu’on n’aura jamais de progrès. Les gens vont venir des campagnes dans les villes, faire le prolétariat. C’est comme ça, ça va se passer. Et lorsqu’on dit qu’on a arrangé le pays, on parle des routes qu’on a faites ici. Vous roulez d’ici à Parakou maintenant, la route est mauvaise. Vous allez à Djougou, la route est mauvaise. C’est comme ça. C’est-à-dire, les relations du pays même, on ne voit pas. Chacun voit autour de lui. Surtout nous autres. Nous avons des voitures, nous avons des maisons. Ah, c’est bien ; on a fait chez moi. Ah, on peut aller à Agla (un quartier de Cotonou Ndlr)… C’est bien. Mais ça apporte quelle plus-value à l’économie ? Quelle plus-value à la population ? Est-ce que c’est notre travail qui a produit ça ? Est-ce que ce n’est pas par le travail qu’on développe un pays? Est-ce que c’est par les emprunts qu’on développe un pays ? On peut faire les emprunts pour booster le travail, la production. Mais, quand l’emprunt ne sert pas à booster la production, qu’est-ce qu’on fait là ?

D’aucuns diront que vous focalisez le débat sur l’actuel gouvernement. Et les gouvernements qui ont précédé ?

Le gouvernement actuel est l’aboutissement des autres non? Vous, vous croyez vraiment qu’il y a eu rupture ? (Rire). Non, je suis honnête avec moi-même. Je ne dis pas que les autres étaient meilleurs. Est-ce qu’il y a pire, je ne sais rien même. Qu’est-ce que je vous ai dit pour développer le pays? Tant qu’on ne parle pas aux populations la langue qu’elles parlent, on ne développe pas le pays. Est-ce qu’il en a eu qui a fait ça ? La Révolution a voulu faire alphabétisation. On n’aurait pu exiger de tout ce monde-là de parler la langue de leur coin. La langue, ce n’est pas que pour communiquer avec les populations. C’est pour communiquer avec l’extérieur.

Monsieur le ministre, nous sommes chez vous ici. Je parie que quand vous avez acquis cette parcelle il n’y avait pas cette rue pavée qui passe devant vous. D’aucuns vous diront que c’est du développement et qu’en  60 ans on a évolué tout de même ?

Ah, si c’est ça vous appelez développement, alors on a développé (rire).

Concrètement, quelle est votre approche du développement ?

C’est le jour où à la campagne les gens auront à manger plus qu’avant et ils vont accéder à la modernité plus qu’avant. Il y a des aspects de modernité qui entrent. Par exemple les petits machins là, routes …. Ça entre  dans les campagnes. Mais au Nigeria, c’est le Haoussa, c’est le Yoruba. C’est adapté aux populations. Ici, ce n’est pas ça.

Donc en 60 ans on a marqué le pas ?

Je n’aime pas caricaturer les choses. On n’a pas marqué le pas. On a avancé de plus en plus dans l’acculturation.

Si on vous demandait de projeter le Bénin dans les vingt ou vingt-cinq prochaines années, qu’est-ce qu’il faut attaquer concrètement pour que nous allions au développement ? Au risque de vous répéter…

Je ne suis pas un Économiste du développement. Je suis professeur des mathématiques, j’ai fait de la politique, j’ai eu une vision des théories de développement. Je pense que le jour où les  60% des Béninois comprendront les textes qui sont pris, déjà au niveau de l’arrondissement, là nous allons vers le progrès. Ce n’est pas pour rien que sous la colonisation on a formé ceux qu’on appelait  des encadreurs ruraux. On les formait dans les langues, ils allaient donc divulguer les choses dans les langues. On a supprimé tout ça. Au début, on a dit culture à la télé. Après, on a dit mécanisation. Ça a donné quoi? (…) Parce qu’on a vu faire ailleurs, il faut qu’on fasse ça. C’est pourquoi, j’ai aimé à un moment donné les coopératives qu’on faisait, mais elles sont mal conçues. Il fallait attaquer le problème essentiel qu’est la mise à disposition des terres emblavées. (…) On a voulu faire de la terre un bien commun. Ce qui n’est pas dans notre culture.

 

Propos recueillis par Jacques Boco

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