Démocratie, droits de l’homme/ Désaveux répétés pour le Bénin: Il est temps que la Rupture s’autocritique

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(Outre la Cadhp, il y a pourtant la Ccja, Uemoa, Madrid, l’Ofpra…)

Au nombre des actualités qui défraient la chronique au Bénin, il y a les arrêts rendus successivement ces deux dernières semaines, fin novembre et début décembre 2020, par la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples dans une affaire, entre un ressortissant béninois et la République du Bénin, au sujet de « l’indépendance et l’impartialité des organes électoraux ainsi que la composition de l’Assemblée nationale ».

 

Dans son examen sur le fond, la Cadhp a « constaté que l’Etat défendeur a violé le droit des citoyens de participer librement à la direction des affaires publiques de leur pays, prévu à l’article 13 (1) de la Charte, du fait que la composition du Cos-Lepi ne donne pas des garanties d’indépendance et d’impartialité, en vertu des articles 17 (2) de la Charte africaine de la Démocratie, des Élections et de la Gouvernance  (Cadeg) et 3 du Protocole de la Cedeao sur la démocratie ». Pour corriger cet état de choses, elle a « ordonné à l’Etat défendeur de prendre des mesures visant à conformer la composition de l’organe en charge de l’actualisation de la liste électorale avec les dispositions des articles 17 (2) de la Cadeg et 3 du Protocole de la Cedeao sur la démocratie avant toute élection ». Par ailleurs, la Cadhp a aussi rendu une autre décision ordonnant fermement l’abrogation de la loi N°2019-40 portant révision de la loi N°90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin, et ce, avant l’organisation de l’élection présidentielle d’avril 2021. La Cour d’Arusha a fait « observer que la loi querellée a été adoptée selon la procédure d’urgence et qu’une révision consensuelle n’aurait pu être acquise que si elle avait été précédée d’une consultation de toutes les forces vives et de différentes sensibilités en vue de parvenir ou si elle  avait été suivie, le cas échéant, d’un référendum conformément aux « idéaux qui ont prévalu à l’adoption de la Constitution du 11 décembre 1990 » et à l’article 10 (2) de la Cadeg ». Conséquence, la Cour africaine a « conclu que la révision constitutionnelle a été adoptée en violation du principe du consensus national » et demandé à l’Etat béninois de « prendre toutes les mesures afin d’abroger la loi N°2019-40 du 1er novembre 2019 portant modification de la loi N°90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin et de se conformer au principe du consensus national édicté par l’article 10 (2) de la Cadeg pour toutes autres révisions constitutionnelles avant toute élection ».

Vendredi 4 décembre dernier, dans une nouvelle décision rendue à la saisine de l’opposant exilé Sébastien Ajavon, la Cour africaine confirme son arrêt précédemment cité.

Gros pavé dans le jardin Rupture

A la suite de ces différentes décisions, et comme c’est la mode depuis 2016 au Bénin chaque fois qu’une sentence n’est pas à favorable au pouvoir en place, on assiste à une levée de boucliers contre la Cadhp. Les habitués à l’exercice n’ont pas dérogé à la tradition. Que ça soit le porte-parole du gouvernement ou d’autres ‘’laboratoires’’ étiquetés pro-Rupture par une certaine opinion, on n’y est pas allé de main morte. Le chien aboie, la caravane passe. C’est une décision de trop. La Cour africaine a surestimé sa capacité d’analyse des normes internes en relations avec les normes internationales. Bref, c’est la quintessence des avis de ces figures bien connues, spécialistes ou non du droit, qui soulignent que la Cadhp n’a pas ce pouvoir d’abroger la Constitution d’un Etat. La décision ne sera donc pas exécutoire. Et on ne s’en cache pas. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que l’Etat béninois rangera au placard de décisions venant de cette Cour que certains thuriféraires du pouvoir de la Rupture qualifient de Cour au service des opposants à Patrice Talon ; et ce bien qu’elle ait débouté ces mêmes opposants dans bien de dossiers. Pour rappel de décision non exécutée par l’Etat béninois sous le président Talon, la Cadhp, dans une ordonnance  rendue vendredi 17 mai 2020 dans trois affaires contre le Bénin, avait enjoint au Bénin de suspendre les élections communales du 17 mai 2020. Mais ces élections ont eu lieu et les conseils communaux et municipaux qui en sont issus sont installés.

Voir au-delà de la Cadhp…

Qu’à cela ne tienne. Mais lorsqu’on a fini de s’en prendre à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, ne serait-il pas bienséant qu’on marque un arrêt pour une introspection sérieuse, au-delà des intérêts inavoués ?  Pour les uns, la Cadhp exagère. Un prétexte qui a d’ailleurs poussé le gouvernement de Patrice Talon à prendre la décision de retirer le pays du protocole qui donne plein droit au citoyen de saisir cette juridiction supranationale. Mais concrètement le mal n’est-il pas plus profond ? Il semble bien que le ver est dans le fruit. Et ne pas l’admettre, c’est vouloir faire tout sauf du droit. Tout s’écroule, tout tombe sur le Bénin dans le domaine de la démocratie, de la Justice ou des droits de l’homme en général. Il va falloir que le régime de Patrice Talon, au pouvoir depuis 2016, accepte se regarder dans la glace et il se rendra compte que le problème n’est pas la Cadhp. Peut-être que, in fine, la Cadhp demande l’impossible dans ses décisions Mais pour en arriver là, le gouvernement, le Parlement et autres institutions ont-ils vraiment fait les choses suivant les principes basiques du droit international ? Est-ce que quelque part, on ne surfe pas ou on n’abuse pas aussi de la non coercition du pouvoir d’une Cour comme la Cadhp ? Autrement, le Bénin ne se cache-t-il pas derrière une prétendue souveraineté pour foncer tête baissée ? Pourtant, ce n’est pas la Cadhp qui a empêché la justice espagnole d’extrader l’opposant et ancien ministre d’Etat Komi Koutché contre lequel un mandat d’arrêt international a été lancé. Le procès de Madrid est encore vivace dans les esprits. Aussi, les structures françaises compétentes sont-elles aussi au service des opposants béninois pour que Sébastien Ajavon, homme d’affaires et allié de Patrice Talon à la présidentielle de 2016, pourtant condamné par la justice béninoise à 20 ans de prison ferme, ait un statut de réfugié politique dans l’Hexagone ? Est-ce parce que la Cour africaine a influencé l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ou parce que cette structure est aux ordres des opposants béninois, qu’elle a retiré, en septembre dernier, le Bénin de la liste des « pays d’origine sûrs » pour une durée d’au moins douze mois ? Cette décision n’a-t-elle pas été motivée par la situation des libertés publiques et politiques dans le pays ? C’est à croire que le gouvernement de la Rupture dirigé par le président Talon et d’autres institutions de la République se refusent de s’ouvrir au monde sur le plan du droit, des droits de l’homme notamment. Visiblement seul le droit tel que conçu et dit par des instances sous la Rupture, compte. D’autres instances supranationales auxquelles on a même souscrit ne doivent pas le remettre en cause. C’est comme cela qu’on peut interpréter certains agissements notés après les décisions prononcées par ces juridictions sous régionales ou internationales. Pourquoi chaque fois être réfractaire aux admonestations de juridiction autre que la Cour constitutionnelle ou les cours et tribunaux du Bénin ? La Cour commune de justice et d’arbitrage (Ccja) qui avait donné raison à Patrice Talon alors opérateur économique, contre l’Etat béninois, sous l’ancien président Yayi Boni, n’est-ce pas cette même Cour qui s’est alignée sur une récente décision de la Cadhp  qui a débouté l’Etat béninois, suite à une requête de Ghaby Kodeih dans le dossier opposant la Société d’hôtellerie restauration et de loisirs Bénin (Shrl) et la Société générale Bénin (Sgb). En effet, la Cadhp avait demandé à la République du Bénin de suspendre toutes actions visant à mettre en exécution le jugement du Tribunal de Commerce de Cotonou, en attendant l’étude au fond du dossier. Cette mesure provisoire de la Cour africaine avait suscité la colère des autorités béninoises qui ont décidé de retirer le Bénin de « sa déclaration facultative d’acceptation de compétence de la Juridiction de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples en matière de requêtes individuelles et des Organisations non gouvernementales ». Voilà que le jeudi 26 novembre 2020, la Ccja statuant publiquement, après en avoir délibéré, déclare nul et de nul effet, le jugement Add n°14/19/Csi/Tcc rendu le 19 décembre 2019 par le Tribunal de commerce de Cotonou. Sont-ce les opposants qui ont encore « corrompu » les respectables juges de cette juridiction ? Sur un tout autre plan, est-il besoin de rappeler ici cette décision rendue en juillet 2020 par la Cour de Justice de l’Union économique et monétaire Ouest-africaine (Uemoa) au sujet des interprétations faite du droit communautaire notamment de l’article 35 du règlement de l’Uemoa relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’avocat dans l’espace Uemoa et les fonctions d’enseignant vacataire. Alors que la Cour constitutionnelle du Bénin dirigée par Joseph Djogbénou, ancien avocat personnel de Patrice Talon et enseignant de droit des universités y voyait une compatibilité, la Cour sous régionale l’a rectifié et recadré en parlant d’incompatibilité.

Autant de décisions qui doivent interpeller les dirigeants actuels du Bénin et certains sachants du droit quant à la perception qu’ils ont de la Cadhp et leurs récriminations incessantes, peut-être à dessin, à son encontre. A moins qu’on soit dans une réinvention du droit à la béninoise.

Worou BORO

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