Pêche au Bénin: Ces pratiques qui amenuisent les ressources halieutiques

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Le Bénin, malgré les plans d’eau dont il dispose, continue d’importer des produits halieutiques. Les ressources halieutiques s’amenuisent considérablement. Les poissons et crustacés sont de moins en moins accessibles. A l’origine de cette non-rentabilité des activités de pêche, plusieurs pratiques sont pointées du doigt. Outre la jacinthe d’eau qui reste une menace évidente mais également perçue comme une opportunité,  l’utilisation des filets à petites mailles et du filet trainant ainsi que les parcs à poissons dits “Acadja“ sont déplorés. Des engins pourtant prohibés qui, malgré sensibilisation et répression, résistent à la règlementation en vigueur notamment la loi-cadre n°2014-19 du 07 août 2014 régissant la pêche et l’aquaculture au Bénin.

 

Ce samedi, 25 avril 2020, les berges lagunaires  d’Aguégués, village lacustre situé au sud du Bénin, sont moins animées comme ce fut le cas auparavant. Il sonnait 11h40 minutes. Sur le plan d’eau, encore trois ou quatre pêcheurs jettent des filets espérant toujours capturer quelques poissons. Pendant une trentaine de minutes, pas de poissons dans la barque. Venus de Houedomè, une localité située à quelques minutes de navigation en pirogue, ces derniers affichent leur désespoir. “Les poissons sont rares dans notre plan d’eau. Nous devons manger. Nous sommes nés pêcheurs et nous ne pouvons que nous nourrir de la pêche. Dieu fera ce qui est bon“, a lancé un jeune pêcheur. A Houedomè, tout est calme et la plupart des pêcheurs se retrouvent sous des paillotes pour partager quelques verres de “sodabi“ (vin de palme). Tokoun Guillaume est l’un des plus vieux de la localité. Pêcheur devenu guérisseur traditionnel, il reconnait que les plans d’eau se vident et des actions urgentes sont indispensables. Qu’est-ce qui explique alors cet amenuisement des ressources halieutiques ? « Ce sont les engins utilisés pour capturer les poissons qui appauvrissent les plans d’eau », rétorque le vieux Tokoun Guillaume. En effet, l’usage de certains engins a été interdit les plans d’eau au Bénin en raison de la menace qu’ils constituent pour la production halieutique. Ainsi, dans l’optique d’une gestion rationnelle, équilibrée et durable des ressources halieutiques, la loi-cadre 2014-19 a, en son article 73, interdit l’usage de « tout engin de pêche fait à partir de nappes de filets aux maillages très étroits et constitué d’un long bras rectangulaire et de poches à chaque extrémité dans lesquelles sont disposées des nasses collectrices dont le bras porte des flotteurs à la ralingue supérieure et d e lests à la ralingue inférieure et sert de guide aux poissons et aux crustacés vers l’une des entrées des poches (« médokpokonou » ou « tokpokonou » ou « tokpiékonou », etc) ». A en croire Hermann Gangbazo, Chef service aménagement et gestion des pêcheries à la Direction de la production halieutique (Dph), les filets à mailles très étroits et le filet trainant contribuent à la destruction de la faune aquatique car facilitant la capture des poissons pas atteint l’âge de la première maturité. C’est-à-dire, ces engins ne permettent pas aux poissons de se reproduire au moins une fois avant la capture. “Donc des mesures ont été prises pour réglementer le maillage des filets pour la pêche“ a-t-il rassuré. Mais en raison de la croissance du nombre de pêcheurs et les ressources halieutiques qui s’amenuisent, de nouvelles techniques sont développées pour ramasser le maximum de poissons. “C’est-à-dire il faut vivre au jour le jour sans se préoccuper du futur de l’avenir, du lendemain“, déplore Hermann Gangbazo.  Si le cadre légal est bien conçu, la question de subsistance amène pourtant les pêcheurs à résister voire contourner la législation en vigueur. “Si on retire définitivement ces filets, beaucoup pourrait mourir de faim“, s’inquiète le vieux Tokoun Guillaume. Et de déplorer cependant « Avec ces filets, ils capturent des petits poissons qu’ils sèchent et font frire  pour ensuite les manger comme du gari ». Quant à Michel Adékpo, jeune pêcheur rencontré à Sô-Ava, un autre village lacustre du sud du Bénin, il estime qu’il est inutile de faire le procès des filets. Car, confie-t-il, s’il y a suffisamment de ressources halieutiques dans les plans d’eau, personne ne voudra user de ces filets à mailles très étroits. « Nous sommes des “toffinous“ (une communauté de pêcheurs) et nous ne connaissons que la pêche. Mais aujourd’hui, nous allons acheter du poisson pour consommer. C’est déplorable. Il faut plutôt élargir le point de migration entre la mer et les eaux continentales » a renchéri Albert Adékpo. Si ces derniers ont de la peine à s’expliquer les vraies raisons de l’amenuisement des ressources halieutiques, l’expert Eugène Comlan Dessouassi affirme que la génération actuelle subit déjà les effets pervers de la mauvaise gestion des stocks halieutiques. Spécialiste des questions de pêche, aménagement et gestion des ressources naturelles, il explique que la ressource reste inextensible alors que la population s’accroit. « Je suis allé une fois à Sô-Ava à Sô Zounko où les gens ont pris de tilapias et ils en ont fait des brochettes. Vous imaginez la taille de tilapia qui a servi à faire de brochette » témoigne Eugène Dessouassi. Ceci, pour démontrer combien ces engins vident les plans d’eau et surtout le désir de vivre au quotidien des pêcheurs. Bien qu’il se réjouisse des récentes actions menées par le gouvernement béninois pour assainir et réhabiliter les plans, il déplore le fait que la pratique se généralise à nouveau. Mais le gouvernement semble conscient du danger. En sa séance du Conseil des ministres du 15 avril 2020, le gouvernement a évoqué l’urgence d’assurer la surveillance permanente des plans d’eau et de sanctionner les éventuels contrevenants qui auront recours aux engins de pêche prohibés sur les lacs Ahémé, Nokoué, les lagunes de Cotonou et de Porto-Novo de même que leurs chenaux. Il a été même décidé de la création d’une unité spéciale de surveillance des pêches.

Parcs à poissons ou “Acadja“ : un véritable défi pour les autorités…

 Parc à poissons en branchages, “Acadja“ est une technique de pêche souvent observée en Afrique de l’Ouest notamment au Bénin. La pratique consiste à enfouir des branchages dans les plans d’eau et à les abandonner durant une année, six mois ou encore trois mois le temps pour les poissons d’y trouver refuge. Pour Zossou André surnommé “étudiant Aguégués“, il s’agit d’une pratique très rentable et qui nourrit du monde. Alors qu’ils recourent généralement à des prêts au niveau des systèmes financiers décentralisés (Sfd) pour la réalisation desdits parcs en branchages, ils n’entendent pas renoncer si aisément à cette pratique pourtant proscrite par la loi-cadre 2014-19 (art 73). “Nous ne pouvons pas abandonner les parcs “Acadja“, l’Etat doit revoir ce volet de son programme d’assainissement des plans d’eau“, lance désespérément André Zossou. Pour Michel Adékpo, jeune pêcheur à Sô-Ava, le parc en branchages ne peut être perçu comme un problème en matière de pêche. C’est un phénomène à double facette, reconnait Hermann Gangbazo, Chef service aménagement et gestion des pêcheries à la Direction de la production halieutique. Car, Autant ils polluent, ils contribuent au comblement du plan d’eau. Selon ses explications, ces branchages en état de dégradation servent de nourriture aux poissons. Même son de cloche du côté de l’expert-spécialiste des questions de pêche, Eugène Comlan Dessouassi. Certes, la pratique est interdite même par la Règlementation de l’Uemoa, mais il est impératif de se préoccuper de l’aspect social, confie Hermann Gangbazo. Si ce dernier atteste que les parcs, tels qu’ils sont utilisés sur les plans, méritent de s’en débarrasser, il reconnait néanmoins la nécessité d’opter pour une stratégie progressive. Cependant, au regard de l’ambition du gouvernement actuel, rien ne saurait tarder. L’opération d’assainissement ayant démarré depuis 2019, des nouvelles actions corsées sont annoncées au cours du Conseil des ministres du 15 avril 2020. Il est même prévu la réorganisation des pêcheries sédentaires. Les jours des parcs en branchages dits “Acadja“ sont-t-ils désormais comptés ? De toute façon, certains plans d’eau en sont déjà débarrassés notamment le lac Ahémé  

La jacinthe d’eau : une calamité !

“On ne sait même pas d’où vient cette plante. Vous l’enlever et à un moment donné, vous allez la voir couvrir toute la surface de l’eau. C’est comme une malédiction car non seulement elle n’abrite pas des poissons mais elle les fait fuir loin“ se désole Albert Adékpo. « Ça nous emmerde vraiment au point où nous l’avons surnommé “Tô gblé“, ce qui veut dire le pays est gâté », lâche de son côté, le vieux Tokoun Guillaume. Plante aquatique proliférante à fort potentiel d’invasion, la jacinthe d’eau serait introduite accidentellement sur les plans d’eau du Bénin. Selon Cyrille Aholoukpê, point focal suivi-évaluation à la Direction de la production halieutique, elle a été importée comme plante ornementale. Mais en raison de la charge anormalement organique des eaux béninoises, la jacinthe d’eau se trouve dans des conditions propices pour se multiplier très rapidement. “C’est une plante qui participe à la purification de l’eau car consommant le surplus de nutriments donc participe à la dépollution de l’eau », explique-t-il. Mais la vérité est que la jacinthe reste une véritable calamité. Outre le fait que sa multiplication exagérée empêche la navigation donc la mobilité sur les plans d’eau, la jacinthe d’eau n’offre pas un cadre viable aux poissons. “ En se multipliant, elle couvre totalement la surface de l’eau. Cela forme une barrière entre les échanges qui devraient s’opérer entre l’atmosphère et l’eau puisque la teneur en oxygène de l’eau provient de l’atmosphère : ce qu’on appelle l’oxygène dissout. L’eau capte l’oxygène à travers le contact eau-air. La barrière érigée par la jacinthe d’eau fait que l’oxygène n’est plus dissout dans l’eau. Ce qui fait que le milieu anoxique. Là où la jacinthe d’eau couvre, il n’y a plus de vie. Aucune espèce halieutique ne peut y vivre parce qu’il n’y a pas d’oxygène. Soit les espèces fuient à la recherche d’autres milieux propices soit ils sont condamnés à mourir“ a expliqué Cyrille Aholoukpê.  Sa prolifération est donc une source de nuisances environnementales, économiques et sociales dans les milieux aquatiques du Bénin. Selon des données, en 8 mois, dix (10) plants de jacinthe d’eau peuvent générer 655 330 nouvelles plantes. La jacinthe d’eau appauvrit les eaux en phytoplanctons diminuant ainsi les chances de forte productivité des eaux. En outre, lorsqu’elle meurt, elle libère dans le milieu tous les polluants qu’elle a eus à piéger. Le milieu aquatique devient très pollué. Selon le projet « Valorisation de la jacinthe d’eau (Eichhornia crassipes) pour la fabrication de biens matériels et des services en milieu lagunaire dans la cité lacustre d’Aguégués, elle couvre plus du 3/4 de la lagune de Porto-Novo en période de crue. « La dégradation de la lagune de Porto-Novo induit la baisse des rendements halieutiques. Entre 1987 et 2012, la baisse moyenne des rendements de  pêche dans la région a été de 25 %. Certaines années, la baisse peut atteindre 55 % comme en 2004. La présence de la jacinthe induit une baisse des rendements de pêche. Face à la situation, le gouvernement a exploité plusieurs pistes de solutions, précise Hermann Gangbazo. Ceci, à travers le Programme de gestion intégrée des plantes aquatiques. Mais ce programme aura beaucoup priorisé la lutte mécanique qui a montré ses limites. Il a été donc suggéré la lutte biologique avec l’importation d’une espèce d’insectes qui se nourrit des racines de la jacinthe d’eau et les détruit en un temps record. Selon Hermann Gangbazo, le gouvernement actuel a suggéré une étude afin de parvenir à la stratégie la mieux indiquée. Pour l’expert Eugène Dessouassi, c’est le moment pour les organisations professionnelles du secteur de la pêche de jouer leur rôle et surtout d’apporter leur contribution. Car, selon lui, si la lutte mécanique n’a pas été une réussite sur la durée, c’est parce que les activités n’ont pas été pérennisées. Plus question de lutter contre la jacinthe d’eau aujourd’hui, rétorque Cyrille Aholoukpê. Le défi reste la gestion de la jacinthe d’eau. Il faudra trouver comment la garder dans des proportions raisonnables, comment transformer la jacinthe d’eau en opportunités d’affaires. D’ailleurs, il est recommandé l’élaboration d’une stratégie de gestion des plantes proliférantes dans le cadre du  programme d’assainissement et de réhabilitation des plans d’eau. “Les études ont montré qu’on peut utiliser cette jacinthe d’eau,  incorporer une partie dans l’aliment du porc,  en faire du compost. Actuellement, trois consultants sont recrutés pour actualiser les données et nous proposer des pistes possibles de transformer la jacinthe d’eau pour produire l’éthanol“ a-t-il rassuré.

De la pollution des eaux à l’intoxication alimentaire…

Des tas d’immondices sur les berges lagunaires, des ordures, les colorants qui sont composés des éléments chimiques sont déversés dans les plans d’eau, des produits pétroliers dans les eaux. La pollution des plans d’eau au Bénin prend des propensions inquiétantes malgré les sensibilisations et l’arsenal juridique réprimant le fait. Des failles dans la politique de gestion des ordures ? Si Hermann Gangbazo, chef service aménagement et gestion des pêcheries à la Dph reconnait des insuffisances dans la gestion des ordures, l’expert-spécialiste des questions de pêche, Eugène Dessouassi estime que les responsabilités sont partagées. “ C’est une question d’éducation de la communauté d’abord, il faut qu’ils savent que les ordures ne doivent pas être jetés n’importe où. Cela doit interpeller la conscience de chacun“ ajoute-t-il. Cependant les conséquences de la pollution de l’écosystème aquatique sont énormes. Les crustacés (crabes et crevettes) et des poissons étant des accumulateurs de métaux lourds, leur consommation peut entrainer une intoxication alimentaire. D’ailleurs, une étude réalisée dans le cadre du projet d’adaptation aux changements climatiques du Laboratoire d’hydrobiologie Et d’aquaculture de l’Université d’Abomey-Calavi (FSA) a montré que plusieurs espèces étaient à des doses hors normes de métaux lourds. Selon Eugène Dessouassi, lorsque les déchets déposés dans les eaux s’avèrent être des perturbateurs endocriniens, cela perturbera la gamétogenèse des poissons. Toute chose qui pourrait empêcher leur reproduction. La pollution facilite également la  prolifération des microorganismes. Toutefois, il faudra espérer que les mesures annoncées récemment en Conseil des ministres du 15 avril 2020 soient effectives. Faut-il le rappeler, le gouvernement a décidé entre autres de la libération des habitats anarchiquement installés et au dégagement des tas d’immondices de l’emprise (berge et eaux) du lac Nokoué et du chenal de Cotonou ; du reboisement des berges, bassins versants et autres espaces libérés.

Reconversion des jeunes pêcheurs : un impératif face aux ressources limitées

C’est une évidence, les ressources halieutiques s’amenuisent considérablement tandis que le nombre de pêcheurs sur les plans s’accroit. Véritable paradoxe ! Une surexploitation des ressources halieutiques s’avère dès lors inévitable. La densité moyenne des pêcheurs au Sud –Bénin, selon une publication, est de 117 pêcheurs/km², largement supérieur à la moyenne de 9 pêcheurs/Km² établie pour l’ensemble des milieux de type lagunaire et/ou estuariens de l’Afrique de l’Ouest et du golfe de Guinée, ainsi que des 12 à 13 pêcheurs/km² généralement admis dans ce type de milieu. Si certains pêcheurs, désespérés, deviennent des conducteurs de taxi-moto dans les villes de Cotonou, Abomey-Calavi ou Porto-Novo, obligés parfois de dormir à la belle étoile, la reconversion des jeunes pêcheurs est plus qu’un impératif. “Ils étudient mais étant donné qu’il n’y a pas d’emploi, ils reviennent à la pêche“, déplore le vieux Tokoun Guillaume. Pour Hermann Gangbazo de la Direction de la production halieutique, la reconversion des jeunes pêcheurs n’a jamais été chose facile. A titre illustratif, il affirme que durant la récente campagne d’assainissement des plans d’eau, des pêcheurs ayant subi des désagréments ont été orientés, par le biais de certains projets du Ministère de l’Agriculture, de l’élevage et de la pêche, vers l’agriculture, le maraichage et le petit élevage et même la pisciculture. “Mais cela pas prospéré parce qu’ils ont toujours souhaité qu’on leur laisse mener leurs activités sur les plans d’eau, c’est ce qu’ils ont hérité. Ils ont même attaque la loi-cadre sur la pêche. Même au niveau de la Cour constitutionnelle, le médiateur de la république a mené des démarches mais on leur a fait savoir que force doit rester à la loi“ a-t-il déclaré tout en espérant que d’autres projets s’en préoccuperont. Ceci, pourrait garantir une gestion durable des stocks halieutiques. Sognito Nathanaël est un jeune étudiant (Licence en Geographie à l’Université d’Adjarra à Porto Novo), résidant à Aguégués. Il pratique également la pêche mais espère ne peut en faire une activité professionnelle. Conscient du fait que les plans d’eau se vident des ressources halieutiques, il regrette que plusieurs jeunes ne fondent encore leurs espoirs que sur la pêche. “J’ai essayé de réunir certains jeunes pour la fabrication du compost qui est une richesse pour les agriculteurs mais cela n’a jamais marché. Je me suis retrouvé seul. D’autres préfèrent aller au Nigéria pour faire le commerce où la pêche en haute mer“ confie Sognito Nathanaël. Pour Eugène Dessouassi, le problème reste entier et de façon globale, il faudra investir dans la formation des communautés. La reconversion a été expérimentée mais cela s’est avérée inefficace. « Il faut éduquer la communauté de sorte à ce qu’ils orientent dès le jeune âge, leurs enfants vers une activité professionnelle. Très peu ont une autre activité en dehors de la pêche or le défi aujourd’hui est de diversifier les sources de revenus pour que la pression soit moindre. Il faut leur montrer qu’on ne peut plus vivre uniquement de la pêche“ a-t-il préconisé. En attendant, les plans d’eau continuent de se vider au Bénin et les pêcheurs espèrent un miracle pour changer la donne. Aux gouvernants d’agir !

 

Aziz BADAROU

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